Appel national pour que la France remplisse enfin son devoir à l’égard de nos aînés

Parce ce qu’autrefois les termes d’hospices, mouroirs ont été jugés dégradants, ces établissements furent renommés au fil des années : maisons de retraite puis établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Ceci a correspondu à une évolution positive de la prise en charge de la dépendance. Mais aujourd’hui que recouvre cette appellation et comment vit-on dans ces structures ?

Le constat se révèle plus consternant d’année en année. C’est pourquoi nous citoyens de ce pays, résidents, familles, personnels et directeurs, voulons par cet appel tirer le signal d’alarme sur la situation des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ainsi que sur celle des dispositifs de maintien à domicile et émettre des propositions. Une situation désastreuse à maints égards que nous condamnons et qui doit cesser. Le consensus est général pour ne pas dire unanime quant à ce diagnostic très sévère. Nous nous élevons avec fermeté contre les conditions d’accueil et de soins devenues intolérables, faites aux résidents des EHPAD comme le sont les conditions de travail des personnels, au sein du pays des Droits de l’Homme, d’un pays qui se proclame de modernité et de progrès.

Oui, c’est bien la société française qui se déshonore en confiant ses aînés à des établissements, à propos desquels des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent, pour stigmatiser des pratiques qui n’ont plus grand-chose à voir avec la bientraitance. Rappelons que ce sont plus de 600 000 personnes qui vivent en EHPAD pour y passer les dernières années de leur vie. Après le scandale lié à la canicule de 2003 et à ses conséquences dramatiques, les pouvoirs publics se sont penchés dans l’urgence sur le problème du vieillissement grandissant de la population française. Des textes de lois, des réformes ont été votées qui une fois de plus n’ont apporté aucune solution de fond, la crise actuelle en est l’illustration. Alors que les plus âgés d’entre nous ont le droit de terminer leur existence dans la dignité, il apparaît aujourd’hui que les mêmes subissent une double  peine: celle des vicissitudes liées au grand âge, mais également celle liée à une fin de vie dans des établissements de plus en plus onéreux, soumis à la loi du profit et à une gestion comptable inhumaine, car c’est bien de cela qu’il s’agit.

Les maisons de retraite, dont on dit qu’elles sont plus rentables que les hypermarchés, sont devenus un véritable Eldorado, le marché pesant en effet entre 25 et 30 milliards d’euros. Il est utile de rappeler que près d’un quart des EHPAD sont des entreprises privées à but lucratif, bénéficiant également de subventions publiques. Gérées par de grands groupes, elles pratiquent des tarifs d’hébergement élevées entre 2 000 et 5 000 euros. Comme l’a montré un récent reportage télévisé, la rentabilité étant leur unique objectif, pour certaines d’entre elles, des économies sordides réalisées au détriment des résidents et des pratiques illégales y sont monnaie courante… !

Dans les établissements publics, au fil des réformes, les acteurs du terrain dénoncent eux aussi des conditions d’accueil et de travail qui ne cessent de se dégrader et ne sont plus supportables.
Les derniers événements, que ce soit dans les établissements privés ou publics, ont mis en évidence le fort investissement des salariés des EHPAD pour leur travail et le très haut niveau d’exigence qu’ils s’imposent. Ils ont aussi révélé l’état d’écœurement, le mot n’est pas trop fort, dans lequel les pousse les conditions qui leur sont imposées et qui ne leur permettent plus d’assurer leurs tâches quotidiennes dans le nécessaire respect de la dignité des personnes dont ils ont la charge. Ces personnels qualifiés et dévoués à leur travail, richesse de notre pays, sont mis dans l’incapacité d’assumer leur mission par un système qui broie celles et ceux qu’il devrait soutenir.

C’est dans ce contexte préoccupant qu’une « Mission flash »a été créée à l’Assemblée nationale par la Commission des affaires sociales, présidée par Madame Brigitte Bourguignon, suite aux conflits sociaux intervenus dans de nombreux EHPAD dont les plus emblématiques sont les Opalines à Foucherans dans le Jura, et les Pensées à Argenteuil, Val d’Oise . La rapporteure de cette mission, la députée de Haute-Garonne, Madame Monique Iborra a rendu ses conclusions le 13 septembre dernier. Un constat sévère et alarmant qui pointe, ainsi que nous le soulignons, des dysfonctionnements et des carences révoltants.

Sans vouloir présumer des suites de cette mission, ni sans vouloir jouer les Cassandre, nous n’ignorons pas non plus que les commissions et les rapports qu’elles déposent tombent souvent dans les oubliettes de l’administration, demeurant ainsi des vœux pieux.

Nous devons arrêter de faire confiance aux commissions en tous genre qui président elles mêmes à leur propre naufrage. C’est aux acteurs de terrain et aux citoyens de prendre en charge le problème. Il nous faut rendre intolérable à la société, la situation faite aujourd’hui aux personnes dépendantes quel que soit le mode de prise en charge, en établissement ou à domicile. C’est à nous tous de réfléchir ensemble à la place que l’on doit leur dédier.

Deux étapes doivent être considérées :
1/ Avant toute choses des mesures d’urgence doivent être prises. Augmentation du ratio personnel/dépendance, encadrement des tarifs d’hébergement…

2/ Élaboration collective et prise en charge citoyenne d’un corps de propositions s’appuyant sur l’expérience des acteurs. (Les éléments de connaissance sont disponibles, halte aux missions d’observation et études redondantes autant qu’inutiles).

La réalité des conditions de vie et de travail dans les EHPAD exige des prises de décisions qui ne peuvent plus être différées, et des actes courageux. Il s’agit d’un problème fondamental de société. Le système actuellement en vigueur a institué la rentabilité et/ou le profit comme seule règle de vie, il ne conduit qu’à la déshumanisation.

Nous, signataires de cet appel sommes convaincus que la mise en place d’un autre modèle de gestion de la dépendance en établissement ou en maintien à domicile est maintenant devenu incontournable. Les atermoiements ne sont plus de mise.

Menons ensemble, résidents, familles, personnels et directions, le combat de la dignité pour que les personnes âgées dépendantes et les personnels qui les assistent vivent et travaillent dans les conditions les meilleures, celles que l’on attend d’un grand pays. comme nous pensons que l’est encore la France et qui s’honore de prendre soin des plus fragiles de ses citoyens.

Rejoignez le Conseil national de la dignité (organisation informelle) en participant à l’élaboration des propositions que nous soumettrons au pays, et en signant l’Appel

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